Les Français seraient-ils particulièrement violents ?
Aujourd’hui, la violence physique connaît un accroissement important en France avec tout particulièrement un nombre d’agressions gratuites en forte hausse mais ce sont toutes les sociétés occidentales qui connaissent ce phénomène.
Non, c’est sur le plan moral, psychologique que les Français se distinguent.
Si l’émergence de l’idéal humaniste des Lumières et sa propagation au sein des sociétés occidentales, avec notamment l’avènement de la démocratie, a contribué à rendre l’être humain plus respectueux d’autrui (plus « optimiste » comme dirait MONTESQUIEU), les Français semblent avoir toujours eu le verbe haut et une tendance à l’agression verbale, sorte d’atavisme d’une société post révolutionnaire qui n’aurait jamais vraiment réussi à trouver une véritable cohésion et où la défiance serait la règle.
Avant tout, examinons les faits.
Dans son livre MEMOIRE D'ESPOIR édité en 1970, le Général de GAULLE, au sujet de la société française, écrivait :
« Les rapports sociaux restent empreints de méfiance et d'aigreur. Chacun ressent ce qui lui manque plutôt que ce qu'il a. »
Déjà, au cours de son mandat, celui-ci n’avait eu de cesse de dénoncer le « tracassin », sorte de critique systématique et permanente de la société et de ceux qui la composent (voisins, collègues de travail, hommes politiques …).
Beaucoup plus tard, en 2007, Pierre CAHUC et Yves ALGAN, dans leur livre LA SOCIETE DE DEFIANCE OU COMMENT LE MODELE FRANÇAIS S’AUTODEDRUIT (Editions RUE D’ULM) révélaient qu’à la question suivante : « En règle générale, pensez-vous qu’il est possible de faire confiance aux autres ou que l’on est jamais assez méfiant ? », seuls 22 % des Français interrogés répondaient positivement alors que la quasi totalité des ressortissants des autres pays occidentaux répondaient majoritairement par la positive.
Mais pourquoi cette critique si souvent injustifiée et peu productive (qualifiée par l’humoriste et imitateur Laurent GERRA de « sport national ») et cette méfiance vis-à-vis d’autrui si généralisées ?
Probablement que c’est l’arrogance, le besoin des Français de dominer qui, mutations sociologiques (arrivée d’une population immigrée importante, émergence d’une bourgeoise intellectuelle vivant dans les centres urbains (les Bobos), paupérisation et déclassement d’une part importante de la population …), sociales (notamment chômage de masse) et surtout économiques (avec la mondialisation) aidant, trouvent ses limites et engendrent, par voie de conséquence, des comportement de peur, de jalousie, de dénigrement vis-a-vis d’autrui de plus en plus marqués ; ces mêmes comportements donnant l’illusion d’une certaine domination, suprématie sur qui de son collègue de travail, qui de son voisin, qui de son député …
Reste que cette situation a des conséquences dramatiques sur la société française.
D’abord sur la jeunesse. Face à cette brutalité de la société, une majeure partie d’entre elle se réfugie soit dans la révolte (avec le terme « colère » qui revient comme un leitmotiv), soit dans le retrait avec comme corollaire, l’absence de rêves, de vision, d’espoir et le repli sur soi-même avec un certain égoïsme faisant office de bouclier-protecteur.
Autre signe d’un important déclin français : le taux de suicide le plus important au monde avec les ex-républiques soviétiques (cf. SUICIDE, L’ENVERS DE NOTRE MONDE, Christian BAUDELOT et Roger ESTABLET, Editions du SEUIL, 2006). Jeunesse en perte de repères et d’avenir, harcèlement au travail (par des employeurs mais aussi par des collègues) sont bien souvent les situations ayant conduit à l’acte suicidaire.
Autre phénomène particulièrement préoccupant : le nombre de femmes qui meurent du fait de violences physiques pratiquées par leur mari (une tous les trois jours). Il est particulièrement révélateur d’un machisme français, déclinaison masculine de l’arrogance franchouillarde.
Au final, les conséquences de cette névrose française, notamment sur l’économie, sont considérables et freinent toutes perspectives de retour au plein emploi, car elle entraîne une importante perdition en terme de création de richesse.
A ce titre, il est intéressant de reprendre les écrits de Alain PEYREFITE, ancien ministre, dans son livre LA SOCIETE DE CONFIANCE : "La société de défiance est une société frileuse, gagnant-perdant : une société où la vie commune est un jeu à somme nulle, voire à somme négative (si tu gagnes, je perds) ; société propice à la lutte des classes, au mal vivre national et international, à la jalousie sociale, à l'enfermement, à l'agressivité de la surveillance mutuelle. La société de confiance est une société en expansion, gagnant-gagnant, une société de solidarité, de projet commun, d'ouverture, d'échange, de communication."
Il faut avoir beaucoup du courage pour innover, investir dans un pays où l’enrichissement est suspicieux, où la prise de risque est bien souvent considérée comme de l’irresponsabilité alors qu’elle est la condition sine qua non d’une création de richesse à forte valeur ajoutée, où la moindre initiative, le moindre changement, la moindre réforme provoquent toujours détracteurs et sarcasmes …
N’y a-t-il pas pire déclin que celui d’une jeunesse en déshérence, ne croyant plus en un avenir plus grand, plus juste, plus humain ?
Pour qu’un pays trouve les grandes inventions, les grandes découvertes, les produits et services qui révolutionneront le futur, il faut que sa jeunesse croie que tout est possible … comme au temps de La Belle Epoque.
Alors que faire face à cette situation ?
D’ores et déjà, quelques pistes à des fins de réflexion …
Au-delà des campagnes publicitaires ciblées (ex : les violences conjugales) et de la sensibilisation au drame du suicide auprès des médecins du travail et des DRH de grandes sociétés, ce sont tous les Français qui doivent prendre conscience que leur comportement est contre-productif et qu’il compromet fortement l’avenir de leurs enfants.
Notamment, les hommes politiques devraient davantage aborder des problèmes de violences au travail et dans le couple et dénoncer systématiquement la critique négative alors que cette dernière met fortement à mal la cohésion sociale.
Cohésion sociale qui est aujourd’hui trop souvent battue en brèche par des salariés et des patrons (à l’esprit « petit patron franchouillard ») qui pensent ne pas avoir le même intérêt et qui se réfugient ainsi dans le corporatisme et le conservatisme.
Il faut que les hommes politiques condamnent publiquement ce mécanisme pervers d’autodestruction de la société française, nocif en terme de croissance économique. Avant tout, ils doivent montrer l’exemple en refusant de céder aux corporatismes de tout poil (enseignants, cheminots, médecins, pharmaciens, taxis, artisans, agriculteurs …) au profit de l’intérêt général.
Mais aussi, il leur faut s’inspirer des pays qui ont réussi à surmonter le déclin moral et économique auquel ils étaient immanquablement destinés. A ce titre, le cas de la Grande-Bretagne de ces trente derniers années doit être étudié avec le plus grand intérêt.
Car, soyons clair, à travers ces problèmes, c’est le déclin d’une France éternelle, celle de la douce France, celle où il fait bon vivre, celle où des peuples d’origines différentes arrivent depuis mille ans à vivre ensemble malgré les guerres civiles et de religion, qui s’annonce.
C’est cette France qu’il nous appartient de sauver en retrouvant le bon sens moral, la gentillesse, la solidarité, le mérite, l’amour d’autrui, l’envie de risquer, de dépasser ses limites, de découvrir de nouveaux univers, de produire les meilleurs produits et services au monde …
A lire ou relire, pour compléter la lecture de ce post, celui que j'ai écrit et intitulé LA RUPTURE DOIT ETRE AVANT TOUT PSYCHOLOGIQUE.
Commentaires